La reconstitution de l’histoire locale est conditionnée par les sources disponibles, et parfois elles manquent. Mais parfois,
alors qu’on a cherché sans trouver, l’investissement
pour le passé réserve d’inattendues et heureuses surprises.
La communication suscitée par la publication du nouveau livre de Roger Lefebvre, consacré aux maires de Quesnoy-sur-Deûle et à leur action de 1904 à 1944, a conduit un descendant d’Albert Bruneau, 2ème adjoint au maire, mais de fait véritable responsable de la commune pendant l’occupation allemande de 1914 à 1918, à prendre contact avec l’association, et à lui remettre de précieux documents. Avec les ressources de la généalogie,
cela nous permet de compléter, et surtout d’illustrer, ce que l’auteur avait pu aborder du rôle essentiel d’Albert Bruneau lors de cette période.
Une longue carrière municipale
Albert Bruneau, brasseur, a été élu pour la première fois conseiller municipal sur la liste menée par Charles Bodé lors des élections municipales du 17 mai 1885. Il sera réélu avec le maire Charles Bodé lors des élections du 6 mai 1888, du 1er mai 1892, du 3 mai 1896, du 6 mai 1900. Il poursuit son action municipale avec le nouveau maire Jean-Baptiste Vandermersch après les élections municipales du 1er mai 1904, et est
réélu le 3 mai 1908. C’est suite au décès de l’adjoint Isidore Delannoy qu’il est élu et promu 2ème adjoint le 22 octobre 1911.
Il retrouve ce poste après les élections municipales du 6 mai 1912, élu conseiller municipal pour la 8ème fois. Lorsque la guerre éclate en 1914, il a 57 ans, il est conseiller municipal depuis 29 ans, adjoint depuis 3 ans. Jean-Baptiste Vandermersch, âgé et parfois souffrant, n’assure plus que théoriquement sa fonction de maire et laisse la gestion réelle de la commune, pendant l’occupation allemande d’octobre 1914 à octobre 1918, à Albert Bruneau, son adjoint. Il est l’interlocuteur officiel et permanent des autorités allemandes, et il a dû affronter
les mille périls et souffrances d’une commune qui sortira de cette occupation détruite à 95 % et vidée de sa population.
Albert Bruneau après guerre
Après la libération de la commune en octobre 1918, il continue de la diriger de fait jusqu’à l’élection municipale du 30 novembre 1919 à laquelle il ne se
présente pas. Mais il s’active pour constituer la liste « héritière » et convainc Paul Lepercq d’en prendre la direction. Celui-ci sera le nouveau maire élu par
le conseil municipal le 10 décembre 1919.
Durant cette année d’après guerre, il amorce le problématique et lent redémarrage de la commune, et il fait adopter lors du conseil municipal du 28 juillet 1919 le plan de
reconstruction, élaboré par l’architecte Édouard Lepercq, d’où sortira le nouveau Quesnoy, celui que nous connaissons.
Albert Bruneau ayant dû lui aussi quitter la commune totalement évacuée en juin 1917 a continué de la gérer à partir de Lille où il réside alors, rue du Faubourg de Roubaix.
Il s’y établira définitivement, sa brasserie ayant été détruite. Il y décédera le 14 septembre 1951 à 93 ans.
Qui était Albert Bruneau ?
Albert-Joseph Bruneau était d’ailleurs né à Lille le 20 novembre 1857. Son père, Léopold-Joseph, né en 1818, a alors 29 ans et est pharmacien rue de l’Hôpital Militaire. Sa mère,
Émilie-Julie Simon a 22 ans et est sans profession.
Il aura 2 frères : Léopold né en 1854 ; Jules né en 1875.
Il s’est marié le 17 octobre 1885, à l’âge de 27 ans, à Arras, avec Nelly-Marie-Eugènie Guilbert, âgée de 23 ans. Celle-ci y réside. Ses parents sont mentionnés propriétaires, son père marchand de couleurs. Albert, lui, réside à Quesnoy, où il vient d’être élu conseiller municipal. Il y dirige une brasserie, on ne sait depuis quand.
Une facture de son entreprise, datée de 1886, nous apprend qu’il était le successeur de la brasserie Béghin.
Le couple réside dans une grande maison de la rue Belle-Croix. Il aura 4 enfants : Valentine née en 1886, Marie-Thérèse née en 1891, Robert en 1893, Pierre en 1897.
Il faut mettre en exergue le rôle majeur et ingrat d’Albert Bruneau, « maire de substitution », qui a eu la lourde responsabilité de diriger la ville pendant la terrible guerre 1914-18, et saluer le remarquable
courage qu’il lui a fallu pour faire face à tant de problèmes, de catastrophes.